vendredi 9 mai 2014

Chibougamau

                               

                                                                               
Il y a trois jours, t'as décidé de prendre le large. Jusqu'à Chibougamau. Tant qu'à être rendue là, t'as décidé de continuer. Jusqu'à la dernière route, jusqu'au dernier chemin. Quand ils t'ont trouvé et qu'ils t'ont demandé ce que tu faisais là, au milieu de nulle-part, tu n'as pas su quoi leur répondre.T'as fini par leur raconter. Ton monde à toi, celui que tu t'es bâti. Parce-que le vrai monde, tu le trouvais de moins en moins beau.

On a longtemps cherché de l'aide pour toi qui n'en voulais pas, parce-que tu le sentais de plus en plus friable, ce monde entre tes doigts. Tu t'y accrochais solidement, parce-que tu savais que la chute serait terrible. C'est vrai qu'il n'est pas tellement beau notre monde, maman. Mais te souviens-tu comme tu aimais planter tes mains dans la terre au printemps?

T'as roulé full pin, la musique trop forte, jusqu'à la fin de la dernière route. Jusqu'au bout du dernier chemin. Puis quelqu'un est arrivé et t'as décidé de lui faire confiance. Si notre système de santé était moins pourri, t'aurais pas eu besoin d'aller si loin. On a cogné à toutes les portes qu'on a trouvé mais partout où on allait, on nous répondait qu'il fallait que ce soit toi qui réclame de l'aide. Même si tu n'étais déjà plus dans notre monde. 

C'est la semaine de la santé mentale, me semble qu'on pourrait en profiter pour se questionner sur la façon dont on intervient au Québec pour traiter les problèmes en santé mentale. J'dis ça de même...


 *Remerciement spécial au personnel médical de Chibougamau, qui ont traité ma mère et notre famille avec énormément de respect et d'humanité.